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`Tiers-inclus`

ou

`En meme temps`

au coeur de la modernité

du 21e siècle

 

Interview en exclusivité avec

Dr. Claude Plouviet

fondateur de www.tiersinclus.fr

un véritable gardien du concept `tiers-inclus` qui parle aux oreilles des Présidents et `en meme temps` des sociétés modernes

by Ingrid Vaileanu 

Interview Francophone: Comment résumer le concept tiers-inclus et quels exemples choisirez-vous pour le rendre clair pour les générations du 21e siècle ? 

 

Dr. Claude Plouviet: En logique classique : Si une proposition « p » est vraie, la proposition contradictoire « non-p » est fausse. Deux propositions contradictoires ne peuvent être vraies ensemble, elles ne peuvent non plus être fausses ensemble, si l'une est fausse, l'autre est vraie : c'est le principe du Tiers exclu.  La logique binaire est non contradictoire : c’est l’un ou l’autre. La logique binaire exclut.

 

La logique du tiers inclus est quant à elle contradictoire :

 

1. L'opérateur « négation » lie un terme au terme antagoniste, de telle façon que l'actualisation de l'un soit la potentialisation de l'autre.

2.  On considère des éléments, des évènements ou  phénomènes et non pas seulement des propositions

3. On considère des dynamismes et non des états.

 

Stéphane Lupasco appelle antagonistes les deux pôles de la contradiction, l'actualisation de l'un est la potentialisation de l'autre.  Quand on comprend les termes opposés comme des dynamismes et non des choses établies ou statiques (logique binaire) , tous les degrés d'actualisation ~ potentialisation sont possibles.

 

Tous les degrés intermédiaires d'une actualisation ~ potentialisation sont des moments contradictoires en eux-mêmes : on les nomme  État-T, "T" comme "Tiers inclus". 

Ce tiers inclus, contient en lui même la contradiction et donc la dynamique du devenir.

 

Exemple : Si je dis : « Je vais bien », j’actualise une proposition. Lorsque j’actualise la proposition « Je vais bien », je potentialise la proposition « Je ne vais pas bien ». Et réciproquement : si j’actualise la proposition « Je ne vais pas bien », je potentialise  la proposition « Je vais bien ».

 

L’une et l’autre ne disparaissent jamais, on dit qu’elles ne sont jamais « absolutisées ». Mais entre ces deux propositions, il existe une infinité d’états intermédiaires, qui contiennent en eux-mêmes un certain degré d’actualisation et de potentialisation de l’une et l’autre des propositions. Ces états T (de Tiers inclus ) contiennent en eux mêmes la contradiction et la dynamique du devenir.

 

Deux postulats sont fondamentaux : les polarités en interaction ne sont jamais absolutisées (ici : « Je vais bien » et « Je ne vais pas bien ») et le Tiers inclus n’est lui non plus  jamais absolutisé.

 

Interview Francophone: Vous êtes l`un des plus grands experts du concept Tiers-inclus. Comment avez vous commencé vos recherches sur ce sujet et qu`est-ce qui vous impressionne et vous intrigue le plus ? 

 

Dr. Claude Plouviet: Vous m’accordez une position et me prêtez une compétence que je ne revendique en aucune façon.

 

J’ai découvert l’œuvre de Lupasco par la référence qui en était faite dans la préface du livre de Gilbert Durand « Structures anthropologiques de l’imaginaire » dans les années 80. La lecture de l’œuvre de S. Lupasco fut ensuite une révélation. J’étais en phase totale avec ses écrits. J’avais, en le lisant, la sensation de trouver l’argumentaire et les explications de ce qui était enfoui dans ma pensée depuis de très nombreuses années : le rejet d’une vision binaire du monde.

 

Dès lors, je n’ai eu de cesse de repérer dans mes recherches, mes lectures, mes rencontres etc…, des concepts répondant à cette logique dynamique du contradictoire, sans que le plus souvent leurs auteurs eux-mêmes n’aient idée du rapport de leur pensée avec cette logique. J’ai mené depuis toutes ces années une quête personnelle multi et transdisciplinaire, dans les sciences humaines (linguistique, ethnologie, sociologie, …), dans les sciences dites fondamentales ( physique, chimie), en art, en littérature afin de repérer des éléments, évènements ou phénomènes ( ce sont les termes utilisés par Lupasco) pouvant répondre aux critères fondamentaux de la logique du tiers inclus.

 

A titre d’exemple ou d’anecdote, l’œuvre de François Jullien est tout à fait en phase avec cette logique. Lorsque je rencontrai à l’issue de l’une de ses conférences à Paris-Diderot, et lui demandai s’il connaissait l’œuvre de Lupasco, il parut surpris et m’avoua que non. Je l’ai rencontré  à nouveau quelques années plus tard lors du colloque lui étant dédié à Cérisy la salle, et ai eu l’occasion d’avoir dans le parc du château une longue conversation avec lui, il n’avait toujours pas lu Lupasco.

 

Cependant, la lecture des « Transformations silencieuses » de F. Jullien dévoile la proximité de sa pensée avec la logique Lupascienne,  adapté à son propre domaine d’étude. J’ai vécu d’autres anecdotes de ce type, dans d’autres domaines, avec d’autres intellectuels.

 

Pour répondre au fond de votre question, ce qui m’intrigue le plus dans cette logique pourrait se résumer en un mot que j’ai découvert chez Pierre Legendre dans « Dieu au miroir ».  Ce mot est « Apodictique ». Du grec «Apodéiktikos: » qui signifie « en dehors de ce qui est montré ». 

La logique dynamique du tiers inclus contradictoire permet, par la juxtaposition d’antagonismes, l’émanation (je n’utilise jamais les mots synthèse ou résultante car ces deux mots ne reflètent pas le dynamisme du Tiers) d’une troisième valeur qui contient en elle-même un certain degré d’actualisation et de potentialisation des antagonismes dont elle émane. Mais ce « Tiers inclus », émanant de cette juxtaposition, de cette tension, et contenant en lui-même cette contradiction,  est imprévisible, tant dans sa dynamique que dans sa « nature ».

 

Ce que l’on voit ou perçoit le plus souvent, ce ne sont que les antagonismes en interaction, ceux de la logique binaire.  Le lien (on ne devrait même pas parler de lien puisque la troisième valeur est incluse dans la relation et utiliser le mot lien nous replonge dans la logique binaire) entre les antagonismes en interaction et ce tiers qui en émane est le point précis de ce qui m’intrigue le plus dans cette logique. Il pourrait s’agir d’un passage mais ce terme de passage nous replonge également dans la logique binaire.

 

Non, nous sommes bien ici dans une logique à trois valeurs, étroitement et indissociablement intriquées les unes aux autres, dans laquelle les antagonismes en interaction et le tiers qui en émane, ne sont JAMAIS absolutisés. Voilà ce qui m’intrigue et nourrit ma réflexion. Je conçois que ce ne soit pas facile à accepter ou même à comprendre car nous avons tous été formatés par la logique binaire.  Mais c’est ce point précis du lien qui n’en est pas un, et de ce passage, qui n’en est pas un entre les antagonismes et cette troisième valeur qui m’intrigue et me fascine. La troisième valeur est « apodictique », elle est en dehors de ce qui est montré, elle est dé- montrée.

 

Interview Francophone: Comment le concept Tiers-inclus peut offrir une lecture des évolutions des stratégies politiques du 21e siècle mais aussi des approches dans l`innovation collaborative, dans les évolutions sociales et sociétales? 

 

Dr. Claude Plouviet: En France, nous assistons actuellement à l’installation d’une politique présentée comme non binaire (« ni droite ni gauche » ou « et droite et gauche »)  illustrée par la locution « En même temps » à laquelle je consacrerai mon prochain article sur le site : tiersinclus.fr.  

Prenant appui sur de très nombreux extraits du livre « Le principe d’antagonisme et la logique de l’énergie » de S. Lupasco, je livrerai une analyse totalement apolitique de l’expression « En même temps »  sous l’angle de la logique du tiers inclus. L’article est un peu complexe mais reste abordable. Il permettra de découvrir et de se familiariser avec la logique du tiers. Le tiers inclus offre une lecture de cette stratégie politique sous un angle très différent et introduit la notion de spatio-temporalité.

 

Au plan international, nous assistons plutôt à une radicalisation des positions plus conforme à une logique de type binaire. La question de l’immigration semble être le fer de lance de cette radicalisation qui me paraît davantage reposer sur une volonté de sauvegarde des identités culturelles que sur du racisme. Si la logique du tiers repose sur la juxtaposition et la rencontre de la diversité, sur l’échange, elle réfute également l’absolutisation des pôles qui la composent. Les sociétés humaines se distinguent des autres systèmes complexes par leur composante affective et culturelle. L’analyse de leur complexité doit en tenir compte.

Il ne s’agit pas ici de prendre partie mais d’analyser les situations. Les grandes vagues migratoires encore récentes, polonaises, italiennes, espagnoles, portugaises, et même roumaines, n’ont pas déclenché de conflits communautaires et ont été « digérées » en l’espace d’une génération. Force est de constater que ce n’est pas le cas des immigrations plus récentes.

 

Le fait religieux est une composante majeure de l’équilibre des systèmes humains. Vue sous l’angle du tiers inclus, la juxtaposition des polarités en relation semble aujourd’hui ne pas fonctionner ou mal fonctionner. Lupasco rappelle que les polarités en interaction doivent être de même nature : « Un élément ou événement ne peut être contradictoire et antagoniste d’un autre élément sans être de même nature que lui : s’il était, en effet, d’une autre nature, il ne saurait le toucher, il constituerait un univers parallèle, qui rendrait impossible tout contact entre eux. »

 

J’ignore si le fait religieux d’aujourd’hui dans son intimité, son essence, son histoire ou sa sociologie, propose une « nature » différente au sens Lupascien, susceptible de nuire à l’émanation d’un tiers inclus mais la question, sous cet angle purement logique, et sans prétendre y apporter de réponse, et sans aucune prise de position peut se poser.

 

Il n’en demeure pas moins que la rencontre et la juxtaposition de la diversité est source de dynamisme et d’émanation de tiers. Il convient de trouver les solutions permettant la mise en relation des antagonismes en interaction, permettant l’émanation d’une dynamique du tiers. La culture, dans sa tolérance,  peut être un des terrains propice d’une relation possible entre antagonismes de natures différentes.

 

Les tendances nationalistes radicalisent les polarités, tendent à les absolutiser. Elle sont donc plus proches d’une logique binaire non contradictoire et s’écartent de la logique dynamique du tiers inclus contradictoire. Elles appauvrissent la dynamique potentielle du devenir, dans tous les domaines ou celle-ci peut jaillir de la juxtaposition d’antagonismes, de polarités en interaction, culturelle, économique, sociétale etc…

 

Il en est de même des situations hégémoniques. Elles  tendent à absolutiser l’une des polarités en interaction et appauvrissent la dynamique créatrice en annihilant la naissance du tiers inclus. L’hégémonisme anglo-saxon en est aujourd’hui la caricature.

 

L’outil linguistique au service d’une vision du monde monopolisée, ne résistera pas à l’inexorable volonté humaine de recherche de la diversité, et donc du tiers. Il en va de la survie des systèmes. Le dynamisme est consubstantiel de la diversité, de la différence, de la rencontre d’antagonismes et donc de tiers inclus. Tôt ou tard, il advient. Même si la myopie du contemporain ne le perçoit pas à l’échelle d’une ou plusieurs générations humaines, l’hégémonisme et la radicalité ne durent pas. Les signes annonciateurs de la perte de l’hégémonisme linguistique, géo-politique, économique anglo-saxon couvent déjà.

 

Interview Francophone: Comment ce concept pourrait être renforcé grâce aux innovations numériques ainsi qu`a l`intelligence artificielle ? 

 

Dr. Claude Plouviet: La dualité onde-corpuscule est un des fondements de la physique quantique. Elle l’est aussi de la logique du tiers inclus contradictoire. Les ordinateurs quantiques entre autres, par la propriété de superposition et d’intrication, permettront des capacités de stockage et de traitement de l’information vertigineuses au regard de la capacité des ordinateurs actuels.

 

Cette puissance servira évidemment  abondamment la perspective de l’intelligence artificielle dont la liste des domaines d’applications et d’usages potentiels est quasi infinie. Il est impossible de tous les envisager. Du traitement de l’image à celui du langage, de l’automatisation aux analyses prédictives, de la robotique à la santé, de la bioinformatique au transhumanisme, etc…  les conséquences sont imprévisibles. Il y aura comme dans tout progrès essentiel, comme dans toute rupture technologique majeure, des conséquences positives et une potentielle dérive malveillante. Le passé nous montre que les conséquences des progrès et des ruptures sont souvent inattendues parfois déroutantes mais parfois aussi inespérées.

 

D’un point de vue positif, les progrès peuvent aller dans le sens du confort, se mettre au service de l’individu, se substituant de manière croissante à des tâches parfois très contraignantes et serviles. Elle permettra des progrès immenses tant dans la connaissance et la compréhension de notre univers, que dans la prospective.

 

Mais la mémoire comme l’intelligence de l’homme risquent d’être de plus en plus externalisées, c’est déjà un peu le cas aujourd’hui : pourquoi se contraindre à retenir ou à comprendre ce que l’ordinateur ou le smartphone mettent à disposition immédiate, ce que les puces, dans un probable proche avenir, implantées ou interfacées au cerveau  fourniront à une vitesse incommensurable : une connaissance quasi universelle et une capacité d’analyse vertigineuse.

 

Vues sous l’angle de l’évolution, les fonctions humaines ainsi externalisées, ou substituées, en tout cas sous-utilisées, risquent d’être progressivement mises en sommeil, comme d’autres l’ont été dans le passé de façon beaucoup plus lente. Sans doute au profit d’autres fonctions. ( A titre de simple exemple, un enfant de 8 ans présente déjà aujourd’hui quelques difficultés à lire ou interpréter une carte routière, mais parvient mieux qu’un adulte à se servir d’un GPS.)

 

D’autres nouvelles fonctions apparaitront dans de multiples domaines. Il est difficile  ou impossible de les anticiper.

 

Il est cependant certain que l’être humain de demain sera différent de celui d’aujourd’hui, il s’adaptera à son environnement immédiat et global, mais je partage la crainte du philosophe Augustin Berque, crainte qu’il a baptisée TOM ( acronyme de Topos Ontologique Moderne, jouant sur l’homonymie de tom et du radical tom- qui signifie « couper » en grec : cette coupure soulignant le manquement à être, la coupure de l’homme d’avec son milieu naturel, par l’absolutisation du mécanicisme.)

 

La rupture sera considérable, sans doute une des plus importantes par son ampleur et sa rapidité, dans l’histoire de l’humanité. Elle présentera par ce gigantisme le risque d’une bipolarité entre le monde d’hier  (celui de la relation de l’homme et son milieu) et le monde de demain (marquant la fuite vers l’absolutisation mécaniciste)

 

Je ne parviens cependant pas à imaginer une intelligence artificielle  intuitive et affective.

 

Je crains que cette puissance de calcul  logarithmique vertigineuse, aux mains de puissances publiques ou privées potentiellement incontrôlables, ne tente d’éliminer la marginalité et ne se cantonne ou ne sélectionne ce qu’elles souhaitent pour le contrôle ou la main mise sur les individus, à des fins politiques, financières ou autres. Je crains que la vitesse et la puissance d’analyse induites et robotisées n’aillent à l’encontre de la réflexion purement humaine et humaniste. Comment et où intégrer l’éthique au milieu de tout cela ? Comment maitriser les dérives potentielles dans cette inéluctable mondialisation ?

 

Le temps « s’accélère ». Nous le voyons dans tous les registres de la vie quotidienne, au point de probablement devenir un luxe inégalable.

 

On peut percevoir l’ébauche de cette pauvreté d’analyse et de ce conditionnement dans les travers de la rapidité de l’information en continu, même si ces chaines d’information tentent de s’en disculper en organisant de faux débats, mirages démocratiques, bâclés ou conditionnés pour désinformer ou simplement de dédouaner de cette critique.

 

Pour revenir au tiers inclus, je crois face à cela, en la force et au génie de la rencontre fortuite,  permettant la juxtaposition contingente d’antagonismes non prédictifs, non sélectionnés, fruits du hasard.  (Tout ce que ne sont pas par exemple les sites de rencontre)

 

Les algorithmes surpuissants permettent l’affinement d’un tri préalable à la juxtaposition d’antagonismes du tiers inclus, me paraissant totalement contraire à la nature même de l’humanité et pouvant conduire à de dangereuses dérives telles (entre autres) que l’eugénisme sous toutes ses formes.

 

Ces algorithmes permettront, sans nul doute des progrès considérables dans des domaines très divers.  Mais le contrôle et la sélection des éléments, évènements ou phénomènes en relation, donc des tiers qui en émanent,  et donc la programmation qu’ils permettront,  risquent de modifier en profondeur l’évolution de notre humanité.

 

Mais l’homme ressent également en lui-même l’indispensable nécessité de chercher et trouver de nouveaux antagonismes, sources de dynamismes liés au tiers inclus. La volonté de conquête spatiale actuelle en est selon moi un exemple,  elle n’est pas seulement une volonté de conquête. Concomitante de la mondialisation, de l’uniformisation, elle est aussi,  dans l’inconscient collectif une  recherche d’un antagonisme « autre », d’une diversité, permettant une dynamique nouvelle par un tiers inclus « autre et nouveau » dont nul ne peut prévoir aujourd’hui la nature ou même l’existence.

 

Interview Francophone: Quel est votre souhait (et conseil pour les générations du 21e siècle) pour la reconnaissance de ce concept et son usage éventuel pour un meilleur 21e siècle

 

Dr. Claude Plouviet: Lupasco explique la dynamique du monde par la tension émanant de contradictoires.

Les enfants n’ont pas l’esprit sclérosé par la pensée binaire qui est une pensée d’exclusion. Lorsqu’on exclut l’autre, dans son existence ou dans sa pensée, de manière absolue ou radicale, on n’exclut pas seulement l’autre extérieur, mais également l’autre qui est en nous, le tiers inclus qui fait un pont entre l’autre et nous.

 

J’ai une fille de 10 ans. Je répondrai à votre question par le biais des grandes directions éducatives que j’ai pensées et choisies pour ce que je pense être favorable à son meilleur épanouissement.

 

Je lutte contre l’addiction aux nouvelles technologies sans bien entendu lui en interdire l’accès. Elle en apprend, comme tous les enfants de son âge progressivement la maitrise. S’y opposer reviendrait à l’isoler du monde dans lequel elle vit et vivra.

 

1. Je tente de lui inculquer une vision non binaire de ce monde, en analysant et tenant compte des antagonismes en relation afin de se construire une opinion en se soustrayant d’une vision purement binaire. (conjuguer les antagonismes n’est en aucun cas une forme d’immobilisme ou d’indécision, bien au contraire. Comme nous l’avons vu plus haut, le tiers inclus porte la dynamique du devenir)

 

2. Je tente de la former à l’analyse critique, de l’inciter à  la curiosité intellectuelle multidisciplinaire. Je ne souhaite pas la voir se spécialiser trop précocement dans un domaine. J’ai l’intime conviction que la connaissance multi ou transdisciplinaire permet de progresser dans son propre choix ou domaine électif d’intérêt ou de spécialisation ultérieure.  L’hyperspécialisation isole, nuit à la rencontre, à la confrontation d’idées, à la juxtaposition de polarités antagonistes, donc de tiers inclus permettant la dynamique des idées, et tend à méconnaitre ou sous estimer la complexité du monde.

 

3. Je renonce à brûler les étapes de la maturation intellectuelle, dans sa vie et dans ses lectures. Trop de parents souhaitent voir leurs enfants aller vite et être performants afin de satisfaire leur propre vanité ou leur propre besoin d’identité à travers leurs enfants.

 

4. Je tente de ne pas lui faire subir la contrainte croissante du temps, ce qui me semble être une des conséquences néfastes du progrès scientifique dont nous avons parlé plus haut. Je lui laisse le temps de la maturation, le temps du jeu, le temps de l’ennui, du repos de l’esprit, de la conversation, de la distraction et celui de l’activité physique.

 

5. Au risque de vous paraître anachronique, je tente de lui inculquer le goût d’une formation classique, l’apprentissage du latin, du grec, qui lui permettra l’accès aux grands textes, aux grands auteurs, à la culture et lui fournira les outils (je n’ose pas dire les armes) du jugement, du libre arbitre, d’expression d’une pensée libre, construite grâce à la connaissance tiers incluse multi ou transdisciplinaire, face au risque de contrôle  ou à la manipulation de cette pensée, de l’information et de la connaissance décrits plus hauts.

 

Je souhaite qu’elle ait la capacité de comprendre les enjeux et les risques, mais aussi les bienfaits potentiels du monde dans lequel elle vivra. Mais aussi de comprendre voire de maitriser les mécanismes de ce qui se joue derrière les immenses transformations actuelles et à venir.

 

Je souhaite qu’elle soit capable de conjuguer la connaissance classique et sa propre intégration à la rupture du monde annoncé, d’être imprégnée de la rencontre, de l’interaction entre ces  antagonismes que sont l’héritage culturel d’un côté et la modernité de l’autre, qu’elle soit capable de réfuter l’absolutisation ou la radicalisation de l’un ou de l’autre, du monde d’hier et du monde de demain,  permettant ainsi l’émanation d’un tiers inclus porteur d’une extraordinaire et passionnante dynamique.  

 

6. Tout cela peut paraître dérisoire face à la complexité de notre monde. Je souhaite enfin qu’elle puisse aborder cette complexité par une vision transdisciplinaire. Nous vivons dans un gigantesque et vertigineux système constitué d’une infinité de systèmes liés entre eux. De l’infiniment petit à l’infiniment grand,  de domaines proches aux plus éloignés, aux plus distincts, tout est directement ou indirectement en interaction. De la juxtaposition infinie d’éléments, de phénomènes ou d’évènements, naissent  infinités de tensions, de relations, d’interactions, de tiers inclus eux mêmes en tension, en relation et en interaction.

 

C’est ce qui crée l’inexorable dynamique du monde et son devenir.

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